Les prescriptions du Dr Muller

Du bon usage du Suicide


Suicide est le premier groupe à abandonner dans les 70's l'attirail obligatoire de tout groupe rock qui se respecte : plus de guitares, de batterie, d'orgue. Il ne sera reconnu qu'après dix ans de galère et d'indifférence sinon d'hostilité du public.


Les pionniers de l'electro-punk

suicideOn peut définir Suicide comme les pionniers proto-punk du rock électronique. Le groupe est original de par sa formation : Alan Bermowitz Vega aux chants et hurlement, Martin Reverdy alias Martin Rev aux synthétiseurs. Ils ne sont que deux à jouer une musique étrange, sombre, minimaliste, une musique qui ouvre la voie à la pop synthétique, à la techno, à la musique dite industrielle. Comme beaucoup de précurseurs, ils sont plus estimés de la critique que du public.


La formation

suicideLe groupe se forme en 1970 et déjà se revendique comme punk. Il semble qu'Alan Vega ait repris le terme d'un article du critique rock Lester Bangs. Alors âgé de 32 ans (il est né le 24/06/1938), Vega n'est déjà plus un teen-ager. C'est un artiste confirmé qui travaille, crée et vit au « Project Of Living Artist », un atelier où se mêlent performances et espace artistique à New York. C'est là, en 1969, qu'il rencontre Martin Reverdy qui joue avec un groupe de jazz avant-gardiste : Reverent B. Mi-1970, le Reverent B est donné pour mort. Les deux hommes fondent Suicide.


Le chemin est long vers la reconnaissance.

Suicide devra attendre 1977 pour sortir son 1er album éponyme. Le nom du groupe vient de Satan Suicide, un comics de la maison d'édition Ghost Rider Comic Book dont Vega est fan. « Ghost Rider » est (par hasard?) un titre fameux de Suicide. Leur musique : sur le background du synthétiseur et de la boite à rythme de Rev, Vega murmure, susurre, hurle. Le groupe se fait connaître au milieu de la scène émergente du glam punk New-Yorkais en compagnie des New York Dolls au Mercer Arts Center. Déjà Vega se fait remarquer en brandissant une chaine à vélo (Vince Taylor electro?) lors des shows du duo. Quant au look, il s'inspire plus des gangs que des hippies ce qui déjà leur vaut le rejet du public et moult jets de bouteilles et autres accessoires. Cette provocation du public est inspiré à Vega par Iggy Pop et les Stooges qu'il a découvert en 1969 lors d'un show au New York State Pavilion en 1969. Un concert décrit par Vega comme du « grand art ».

Après la fermeture du Mercer Arts Center en 1973, le groupe joue au CBGB et au Max's Kansas City où il partage l'affiche avec les Ramones, les Talking Heads, Pere Ubu, les Cramps, les Dead Boys.


Le 1er album

suicideLorsqu'il paraît en 1977, le disque n'atteint pas les sommets des hit-parades. Pourtant, il est aujourd’hui regardé comme un classique. Un critique écrit : « ces hymnes proto-punks forts, inquiétants, se classent parmi les expérimentations mélodiques les plus visionnaires que le rock ait jamais produites ». On trouve sur cet album, à la pochette striée de coulées de sang, les futurs classiques du groupe : « Rocket Usa », « Ghost Rider », « Frankie Teardrop ». Sur le second album, on retiendra plus particulièrement des titres comme « Space Blue Manbo », « Do It Nice » ou « Tough Guy ».

Ces enregistrements ont profondément marqué le rock. Il n'est qu'à citer les groupes qui revendiquent l'influence de Suicide : The Jesus and Mary Chain, The Sisters of Mercy, Henry Rollins, Joy Division/New Order, Soft Cell, Nick Cave, Cassandra Complex, Sigue Sigue Sputnik, Radiohead, Spacemen 3, Spiritualized, MGMT, Sonic Boom, Loop, The Fleshtones (ces deux derniers groupes ont enregistré une version de "Rocket USA"), Ric Ocasek des Cars, R.E.M. et The Kills. Ah oui, n'oublions pas la superbe reprise de « Ghost Rider » par les Gories de Mick Collins.

 


Ghost Rider


Séparation – Reformation

En 1980, la messe est dite. Vega s'oriente vers une carrière solo au cours de laquelle, il enregistrera quelques petites merveilles comme « Juke Box Baby » ou « Collision Drive » qui reprennent des tendances déjà à l’œuvre dans Suicide (cf. « Rocket USA ») et définissent un nouveau genre : le rockabilly synthétique près de l'os. Le duo se reforme sporadiquement pour des tournées ou des ablums comme en 1988 (album A Way Of Life), en 1992 (album Why Be Blue), en 2002 (album American Supreme).

 


Juke Box Baby


Bouclons la boucle : en mai 2010, Suicide joue l’intégralité de son premier album lors de deux shows à Londres en première partie des Stooges qui eux reprennent Raw Power. Même si Suicide n'est connu que des esthètes rock (on en veut pour preuve la cinquantaine de personnes présentes à Marseille lors de l'excellent concert de Martin Rev au Trolleybus ce 19 mai 2012), il n'en reste pas moins que ce groupe est essentiel par les fondations qu'il a posé. Pour finir laissons la parole à Alan Vega : « Quelqu'un a dit que Suicide était l'ultime groupe punk car même les punks nous haïssaient. »

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