Histoires Rock -
L'argent ne fait pas le bonheur ?
Tout le monde connaît l'assertion « L'argent ne fait pas le bonheur mais il y contribue ». Bien sur, certains ne sont pas d'accord.
Par exemple un certain Karl Marx assure :
« L’aspect de la monnaie ne trahissant point ce qui a été transformé en elle, tout, marchandises ou non, se transforme en monnaie. Rien qui ne devienne vénal, qui ne se fasse vendre et acheter ! La circulation devient la grande cornue sociale ou tout se précipite pour en sortir transformé en cristal monnaie. Rien ne résiste à cette alchimie, pas même les os des saints, et encore moins des choses sacro-saintes, plus délicates […] De même que toute différence de qualité entre les marchandises s’efface dans l’argent, de même lui, niveleur radical, efface toutes les distinctions. Mais l’argent est lui-même marchandise, une chose qui peut tomber sous les mains de qui que ce soit. La puissance sociale devient ainsi puissance privée des particuliers. Ainsi la société antique le dénonce-t-elle comme l’argent subversif, comme le dissolvant le plus actif de son organisation économique et de ses mœurs populaires. »
Marx - Le Capital
Money is what i need
Cependant Marx n'est pas vraiment un exemple pour les entrepreneurs ambitieux, pour eux c'est l'argent qui mène le monde et c'est très bien ainsi. Prenons en exemple le fondateur des disques Tamla Motown, un certain Berry Gordy..Ce dernier écrit avec Janie Bradford, en 1959, ce qui deviendra le 1er tube de la future Tamla Motown. Le disque est distribué nationalement par Anna Records qui appartient à Gwen Gordy et Anna Gordy (on reste en famille). Il devient rapidement un gros succès. La chanson est interprétée par Barrett Strong. Ce dernier chante et joue du piano sur le morceau. Par la suite, il clamera avoir écrit le titre avec Berry Gordy et Janie Bradford. Gordy ne l'a pas entendu de cette oreille puisqu'il a fait supprier le nom de Barrett Strong du copryght trois ans après que la chanson ait été écrite. Le copryght a été renouvelé en 1987 : il comprenait à nouveau le nom de Barrett Strong. En 1988, le chanteur est à nouveau effacé, une erreur d'écriture selon Gordy qui décidément ne voulait pas donner sa part à Barrett Strong.
Money is what i want
On pourrait en conclure que Berry Gordy est avide d'argent et l'on aurait raison si l'on considère qu'il a fait fortune grâce à « Money » et à Tamla Motown, symbole d'une intégration verticale fordiste où tout est conçu, réalisé, produit sur place à Detroit pour diminuer les coûts de production. On ne peut reprocher, en tout cas, à Gordy d'être hypocrite :
Money
De l'argent (c'est ce que je veux)
Les meilleures choses dans la vie sont gratuites
Mais seuls les oiseaux et les abeilles sont gratuits
J'ai besoin d'argent
C'est ce que je veux (trois fois)
Ton amour me fait un sacré effet
Mais ton amour ne paie pas mes factures
L'argent ne peut pas tout, c'est vrai
Mais ce qu'il n'achète pas, je m'en fous
De l'argent
Un tas de fric
Un paquet de fric
C'est ce que je veux
Donnez moi de l'argent ;
Oh, un tas de fric
Tous ces petits billets verts, ouais
J'en veux, c'est ce que je veux
Tout ce que je veux, ouais
Berry Gordy ne pouvait être plus clair et il est amusant de constater que l'impitoyable homme d'affaire noir a parfaitement réussi son coup. Si l'on met de coté ces considérations éthiques, il faut aussi dire que « Money » est une chanson fantastique, que l'on se rappelle aisément, avec un groove imparable.
Les versions
on veut pour preuve le nombre de versions de « Money » qui doit avoisiner la cinquantaine bon poids. Voici quelques exemples de ces version en débutant par la version originale
Barrett Strong
Les Beatles
En 1963, les Beatles enregistrent en sept prises leur version de « Money »,le 18 juin 1963. Elle figure sur l'album sorti en novembre 1963, With The Beatles. Cette version est l'une des meilleures jamais enregistrées. La fougue de Lennon et la violence de l'interprétation de Mc Cartney, Harrison et Star emporte tout sur son passage. Nul doute qu'après avoir galéré des années durant à Hambourg, les Scarabées approuvaient totalement le programme de Berry Gordy.
Rolling Stones
Les Rolling Stones n'ont pas attendu longtemps avant d'enregistrer leur version de Money, 1964 pour être précis. Curieux tout de même de constater que les deux groupes que l'on a si souvent présentés comme antinomiques partageaient de nombreuses références. Une histoire de manager en quelque sorte.
Plastic Ono Band
John Lennon a lui aussi commis sa version de « Money » en 1971 à Toronto, avec le Plastic Ono Band (Yoko Ono, chant (?), Eric Clapton, guitare, Klaus Voormann, basse, Alan White, Batterie et même Kim Fowley dans un coin.
L'argent dans le garage
Les groupes garage-punk ne sont pas en reste avec les versions des Knickerbockers (1965),très influencés par les Beatles et celle des Sonics (1965) qui confirment leur réputation de groupe sauvage. La version de Paul Revere and The Raiders (1965) n'est pas très loin des deux premières.
Knickerbockers
Sonics
Paul Revere and The Raiders
On pourrait encore citer la versions des Kingsmen (cf. « Louie Louie ») qui a atteint la seizième place dans le hit parade national américain, celle de Jr. Walker & The All Stars en 1966, de Jerry Lee Lewis sur le fabuleux Live at the Star Club, Hamburg, les Searchers, John Lee Hooker, les Doors, les Trashmen, Eddy Mitchell, Dick Rivers, Jimi Hendrix, Diana Ross, etc.
On se contentera pour terminer, d'une version atypique de « Money », celle des Flying Lizards qui en juillet 1979, enregistrent un arrangement « New Wawe » du titre et publient un album éponyme. Avec succès d'ailleurs puis que leur relecture de « Money » atteint la 5ème place des Charts en Angleterre et la 22ème aux USA.
Flying Lizard
Comme on le voit avec « Money », il suffit parfois de désirer très fort d'avoir de l'argent pour que le désir se transforme en réalité. Ce n'est malheureusement pas toujours le cas... D'aucun rêvent de supprimer l'argent, d'autres d'en avoir toujours plus, pour l'instant c'est l'argent qui mène le bal et paie l'orchestre.