La fabuleuse épopée du Glam- Glitter

Le Glam-rock ou Glitter a marqué une rupture dans le rock, rupture qui a mené au punk et à la New-Wawe.

En ce début des années 70 règnent en Angleterre le rock psychédélique, le hard-blues qui vire hard-rock, le rock progressif. Il n'y a rien pour les teen-agers ou pour ceux qui apprécient une musique moins sophistiquée que celle de groupes comme King Crimsom, Genesis, Yes ou qui n'ont pas envie de soli de guitare d'un quart d'heure ou d'un solo de batterie du même acabit. C'est alors que Marc Bolan quitte son déguisement de farfadet moyenâgeux pour endosser celui plus trouble d'idole ambiguë sexuellement. Il n'est pas le seul puisque quasiment dans le même temps, un certain David Bowie crée le personnage de Ziggy Stardust, lui aussi clairement bisexuel et provocateur (maquillage, tenue à paillettes (glitter)). Ils ne seront pas seuls puisque qu'un grand nombre d'artistes font faire de même : retour à une musique simple voire simpliste, costumes voyants, brillants, pailletés, parfois ridicules.


Glam prolo vs Glitter Arty


Le Glam populaire

Dès le début du Glam deux tendances s'affrontent. D'un coté les groupes tels que Roxy Music, Be Bop Deluxe, Cockney Rebels, Mott The Hoople, des individualités comme Bolan ou Bowie, de l'autre s'agitent les Slade, Sweet, Mud, Bay City Rollers, Chicory Tip, Gary Glitter, le Glitter Band, Geordie, etc. Les premiers produisent un rock sophistiqué mais qui n'oublie pas de faire danser, les seconds pratiquent une musique inspirée des années 50 et dont le modèle pour certains pourrait être Sha Na Na ou Flash Cadillac & The Continental Kids, en gros American Graffiti et la Bubble Gum music. C'est le cas de Mud ou de Gary Glitter, des Bay City Rollers. Le mouvement Glam ne s'exportera guère aux USA bien que l'on puisse citer les New York Dolls, Suzie Quatro comme partie prenante de cette scène. Quant à Lou Reed si l'on peut le citer dans cette mouvance c'est surtout pour « Vicious », avant..., après...

Sweet, pas si doux et Slade pas si skinhead

Sweet joue un rock parfois agressif (« Ballroom Blitz » (1973)), parfois honteusement commercial (« Co Co », « Little Willy »). Sweet est managé par le duo Nikky Chinn et Mike Chapman. Sweet exploite la palette glam : chaussures à semelles compensées, pantalons en satin, maquillage extravagant et provoquant, une certaine ambiguïté sexuelle.

Sweet - Balroom Blitz

 

Slade lui vient de loin, les In-Betweens en 1966, groupe anonyme de l'armée du rock anglais. A la fin des années 60, ils se réinventent en Ambrose Slade puis en Slade. A ses débuts en tant que Slade le groupe a une allure Skinhead puis change vite son fusil d'épaule et adopte un look Glam : cheveux longs, bottes brillantes, rock énervé et paillettes de rigueur. Et ça marche, Slade a eu seize titres classés dans les 20 meilleures places entre 1971 et 1976, dont six premières places, trois deuxièmes et deux troisièmes.

Slade - Get Down and Get With It

Mud, de la boue dans les hit-parades

mudComme Slade, Mud vient de loin puisque la première formation du groupe date de février 1966. Il leur faudra attendre 1973 pour engranger quelque succès sous la houlette des prolifiques Nikky Chinn et Mike Chapman : « Tiger Feet » numéro 1 (1974), « Lonely This Christmas » (1974), « Oh Boy » de Buddy Holly en 1975. Musicalement la chose est proche du rock années 50 mais dans une version édulcorée.

Mud - Tiger Feet


Bay City Rollers petites filles et sucreries pop

bayLes Bay City Rollers ont ils leur place dans la catégorie Glitter ? Non, si l'on se conforme à leur allure pantacourts et tartans écossais, oui si l'on considère leur musique simple à destination des pré-adolescents. Ils explosent en 1974 avec "Remember (Sha-La-La-La)" puis enchaînent les tubes jusqu'en 1976.

Bay City Rollers - Remenber (Sha la la)

Chicory Tip et le moog

chicoryLes Chicory Tip se sont formés en 1967 dans le Kent (Angleterre). Leur principal tube a été écrit par Gorgio Moroder, « Son Of My Father » (1972). A noter que ce titre est le premier ou apparaît le moog synthetiser. Ce fut le quart d'heure wharolien du groupe qui se sépare en 1975.

Chicory tip - Son Of My Father

Gary Glitter, perdu par les sweet little sixteen

garyGary a commencé sa carrière sous le nom de Paul Raven. Il est devenu célèbre au début des années 70 avec une série de tubes en Angleterre comme "Rock and Roll, Parts 1 and 2", "Do You Wanna Touch Me", "I Love You Love Me Love", "I'm the Leader of the Gang (I Am)", et "Hello, Hello, I'm Back Again". Entre 1972 et 1995 Gary a accumulé pas moins de 26 titres classés dans les hit-parades dont 12 dans le Top Ten. Sa musique est parfaite pour les stades de football et les hit-parades : paroles minimales, musique à l'avenant. Mais la star à talons compensés et à costumes pailletés descend en enfer à cause de son goût immodéré pour les petites filles et garçons. Il réfléchit actuellement à son destin en prison. Toujours est-il qu'il a influencé Mark E Smith, le leader de The Fall, les Vibrators, Joan Jett qui a repris « Do You Wanna Touch Me », Freddy Mercury et même les Sister of Mercy.

Gary Glitter - I'm the Leader of the Gang

Glitter Band, on ne change pas un nom qui gagne

glitterQuand Gary Glitter obtient son premier succès avec "Rock and Roll, Parts 1 and 2", son manager Mike Lander s'inquiète du fait que s'il veut tourner Gary a besoin d'un groupe. Il embauche alors le Boston Showband qui devient le groupe de Gary. En 1973 il se dit qu'il pourrait doubler la mise et suggère que le Glitter Band poursuive une carrière distincte. C'est chose faite avec « Angel Face », un numéro 4 en 1974 et « Just For You » la même année (numéro 10). La série s'arrête avec l'arrivée dans le paysage musical des Sex Pistols.

Glitter Band - Angel Face


Voila pour l'essentiel du rock Glitter destiné aux pré-adolescents. Mais il y a une autre face du Glitter, plus intellectuelle, moins influencée par la Bubble Gum Music et les années 50 revisitées. Les phares de cette scène sont David Bowie et Marc Bolan.


Le Glam arty - Les costumes sont identiques mais la musique...


David Bowie du mod à Ziggy poussière d'étoiles

bowieDavid Bowie (1947 – 2016) a débuté sa carrière en 1963 avec les Konrads, il l'a poursuivie avec David Jones with the King Bees puis les Mannish Boys puis Riot Squad et d'autres encore. Il adopte le pseudonyme Bowie en 1965 pour ne pas être confondu avec le Monkees Davy Jones. C'est en 1969 qu'il connaît son premier succès avec « Space Oddity » produit par Tony Visconti. Cependant l'album enregistré après, Man of Words / Man of Music, peine à trouver son public. En 1970 sort The Man Who Sold The world toujours produit par Visconti mais c'est avec Hunk Dory paru en décembre 1971 que Bowie s'impose. On y trouve des titres tels que Life On Mars, Changes ou encore Queen Bitch aux accents velvetiens. C'est en 1972 que Bowie explose avec The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars. Bowie contribue fortement à la mode du Glam Rock par ses cheveux teints en rouge, son ambiguïté sexuelle son extravagance. Sur scène et sur disque, il incarne Ziggy Stardust, mélange d'Iggy Pop, de Marc Bolan, de Vince Taylor. Rendons grâce à Bowie car d'une part il a été le catalyseur d'un Glam rock nettement plus subversif que celui des dinosaures de l'époque et d'autre part il a produit Transformer de Lou Reed, All The Young Dudes de Mott The Hoople et surtout Raw Power d'Iggy Pop and The Stooges. Vient ensuite l'album Aladdin Sane et sa célèbre pochette. Le 3 juillet 1973, Bowie abandonne symboliquement le personnage de Ziggy Stardust. A t'il senti le vent tourner et s'est-il dit que le Glam ne durerait pas éternellement et qu'il valait mieux changer de style avant qu'il ne soit trop tard ? Toujours est-il qu'il enregistre Pin Ups, qui sort en décembre 1973, un album composé uniquement de reprises des années mods/hippie de Bowie (Who, Yarbirds, Pretty Things, Pink Floyd). Son dernier album Glam est Diamond Dogs paru en 1974 ensuite c'est le virage funk et cela ne nous concerne plus pour ce sujet.

David Bowie - Suffragette City

Mott The Hoople- les punks leur doivent beaucoup

mottL'histoire de Mott The Hoople a déjà été racontée ici mais un petit rappel ne peut pas faire de mal. Au début, en 1966, il y a le Doc Thomas Group où il y a déjà Mick Ralphs aux guitares et Overend Watts à la basse. Il faut attendre que le producteur Guy Thomas qui travaille pour Island Records les remarque en 1969 et aussi l'arrivée de Ian Hunter au chant pour que la formation du groupe se stabilise. Au départ, Mott the Hoople hésite entre un folk-rock californien et un hard rock violent (voir leur version de « You Really Got Me » des Kinks ou mieux, « Thunderbuck Ram »). Si le groupe remplit les salles, les ventes de disques sont squelettiques et la séparation proche. Arrive Bowie qui leur propose d'enregistrer « Sufragette City » qu'ils refusent. Mais la seconde proposition de Bowie, « All The Young Dudes » (1972) les agrée et c'est tant mieux pour eux car c'est le tube. A la suite de ce succès, le groupe se glamise si l'on peut dire : satin, bottes à talons haut, hauts de forme, boas. Mott aura encore quelques succès tels « Honaloochie Boogie », « All The Ways From Menphis ». Après leur dernier tube en 1974 « Roll Away The Stone », le groupe se défait, départ de Mick Ralphs remplacé par Luther Grovesnor (ex Spooky Thooth) puis par Mick Ronson, ex guitariste des Spiders From Mars de Bowie. En 1975 l'aventure est terminée même si un Mott tente d'exister sans Ian Hunter parti former un duo avec Ronson. L'influence de Mott The Hoople est déterminante dans la mesure où, par exemple, Mick Jones des Clash était un fan du groupe.Ce qui trace une filiation directe entre le Glam hard-rock de Mott The Hoople et le futur punk.

Mott the Hoople - All The Young Dudes

T Rex ou Marc Bolan le petit roi de la pop

bolanMarc Bolan fut d'abord une figure Mod puis forme en 1967 Tyrannosaurus Rex qui pratique un folk-rock psychédélique. Le duo Bolan / Steve Peregrin Took enregistre 4 albums puis, en 1969, amorce un virage électrique. En 1970, le nom est raccourci en T Rex ce qui se retient mieux. La même année le single « Ride a White Swan » concrétise la transformation et le groupe obtient le succès et devient une référence de la scène Glam émergente. De 1970 à 1973, la popularité de T Rex est comparable à celle des Beatles (on verra même Ringo Star dans un film consacré à T Rex, le calamiteux Born to Boogie). T Rex c'est quatre numéro un en Angleterre : "Hot Love", "Get It On", "Telegram Sam" and "Metal Guru". L'album Electric Warrior atteint lui aussi la première place. Ensuite les choses deviennent plus difficiles bien que The Slider se classe dans les 20 premières places du Top 20 américain et que « 20th Century Boy » atteigne la troisième place en Angleterre. Bolan meurt dans un accident de voiture en 1977 quelques mois après la sortie de son ultime album Dandy in the underworld. De nombreux artistes se réclament de l'influence de T Rex : Les New York Dolls, Kate Bush, Siouxsie and the Banshees, Joy Division, les Smiths, les Pixies, Tricky, les Sparks, les Slits, Prefab Sprout, les Ramones, Oasis.

T Rex - 20th Century Boy

Roxy Music - de l'art dans le Glam

roxyRoxy Music a été fondé en 1970 par Brian Ferry, le chanteur et compositeur et le bassiste Graham Simpson. S'ajoutent au duo fondateur le guitariste Phil Manzanera, le saxophoniste Andy Mackay, le batteur Paul Thompson et Brian Eno au synthétiseur sans oublier Eddie Jobson au violon et synthétiseur et plus tard John Gustafson à la basse. Roxy est devenu un groupe à succès avec son 1er album Roxy Music qui mêle le Glam et des éléments plus expérimentaux dont le synthétiseur d'Eno. Il s'institue ainsi comme un modèle pour de nombreux groupes de la futur New Wawe mais aussi pour le punk de par sa préoccupation pour la mode et le style (Brian Ferry principalement). Roxy Music le 1er album enregistré en mars-avril 1972 est produit par le producteur et parolier de King Crimson, Pete Sinfield. Le disque atteint le top 10 des charts anglais. Mais c'est le single « Virginia Plain » qui fait un carton : numéro 4 des charts anglais. Ce qui fait aussi date, c'est l'allure composite du groupe qui va des costumes chics de Ferry et Mackay à l'allure Glam d'Eno avec ses pantalons pattes d'éléphant. Le groupe devient un modèle pour le Glam anglais. Le second opus, For your Pleasure, sort en mars 1973. Il est précédé du single « Pyjamarama » et la pochette de l'album est illustrée d'une photo d'Amanda Lear installée dans une Jaguar noire. Bref une certaine idée du cool et du chic qui va faire école. Les choses se gâtent après cet album, Eno s'en va arguant de désaccords avec Ferry. Cela n'empêchera pas Roxy Music d'enregistrer encore deux disques considérés comme parmi les plus originaux et consistants du rock anglais de l'époque : Stranded (1973) et Country Life (1974). Bien sur on est loin avec Roxy Music des Bay City Rollers, de Sweet et de Slade mais cependant il y a un lien dans une certaine transgression des rôles sexuels et le désir d'une musique qui ne soit pas réservée aux virtuoses (Brian Eno ne sait jouer d'aucun instrument mais il est un technicien capable d'utiliser un synthétiseur).

Roxy Music - Virginia Plain

Be Bop Deluxe - Sister Seagull

Cockney Rebel - Make Me Smile

Pour en finir avec le Glam Arty, citons Be-Bop Deluxe et Cockney Rebel. Le 1er est l'œuvre de Bill Nelson et fût comparé à ses débuts à David Bowie, actif de 1974 à 1978 le groupe a joué une musique qui emprunte au rock progressif, au Glam pour l'apparence (le maquillage) et un rock hard. En ce qui concerne Cockney Rebel, c'est le même schéma puisque le groupe est principalement le vecteur de Steve Harley. Cockney Rebel enregistra deux albums entre 1973 et 1974 puis devient Steve Harley & Cockney Rebel.


Le Glam a vu de nombreux artistes se réclamer de son esthétique ambiguë, outrancière, et de son style ouvertement bi-sexuel dans les années 70 citons Alice Cooper, Jayne County, Milk 'N' Cookies, les New York Dolls, Suzy Quatro, Lou Reed, les Sparks, The Tubes, Jobriath, Kiss, pour le versant américain de la chose, pour le versant anglais, il y a les Darts, les Doctor of Madness, David Essex, Geordie (avec futur le chanteur d'AC/DC Brian Johnson), les Heavy Metal Kids, Elton John, Queen, Showdaddywaddy, Silverhead, Alvin Stardust, Wizzard et Roy Wood. Bien que le Glam ait vu sa popularité décliner dans la seconde moitié des années 70, il a influencé le Glam métal américain des années 80 avec des groupes tels que Quiet Riot, W.A.S.P., Twisted Sister, Mötley Crüe, Kiss. Il a été aussi une influence majeure pour Adam & the Ants, Culture Club, Bronski Beat, Frankie Goes To Hollywood. Son influence peut aussi se remarquer sur le punk qui s'est inspiré de l'emphase sur le pop art et d'une musique simple et puissante. Pour conclure, on peut aussi estimer que le Glam est aussi présent dans la musique et l'apparence de Prince, Marilyn Manson, Suede, Placebo et bien d'autres. Bref le Glam n'est pas mort, il bouge encore !

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